LE JOURNAL DU PAYS
Chronique du mois
Par la Directrice du Journal du Pays: BINTOU DIALLO
JP: Numéro 55 d'octobre 2001
Sortir du Flou Si le propre d'un bon leader est de beaucoup faire sans trop révéler et de plaire en s'engageant sur tous les fronts, alors la visite du 15 septembre 2001 de l'Abbé Diamacoune au Président sénégalais Abdoulaye Wade fut presque un sans-faute. Sur la forme: destiné à rassurer le peuple casamançais à double titre - sur la capacité de la nation à surmonter la crise de Banjul d'août 2001 autant que sur la sienne propre à la maîtriser-, le déplacement du leader du Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance aura largement atteint son but. Passés les dérapages verbaux des jours qui ont immédiatement suivis la rencontre de Banjul devenue tristement célèbre, Diamacoune s'est montré à l'aise, jouissant du plein contrôle de ses actes et de ses responsabilités. Un chef qui cherche depuis un an de s'entourer d'une équipe de confiance et qui a su enfin trouver l'équilibre entre la colère, l'émotion et la détermination. Sur le fond, la question centrale à laquelle Abbé Diamacoune se devrait de répondre: quelle coalition pour quel objectif avec le Sénégal ? La nature de l'objectif façonnant, bien entendu, le contours de l'indépendance de la Casamance. Il faut distinguer d'une part, ceux qui prônent une large coalition comprenant les alliés traditionnels de Diamacoune et la majorité du maquis; de l'autre, les tenants d'une coalition beaucoup plus étroite, Sidy Badji et son groupe de Diakaay visant un objectif beaucoup plus ciblé. Diamacoune semble t-il a tranché mais dans tous les sens. La paix et le développement de la Casamance sanctionnant le communiqué final de l'entrevue entre Diamacoune(Président pour les uns et toujours Secrétaire Général pour les autres) et Wade confortent les uns et les autres. Diamacoune a donc mentionné que deux cibles: Paix et Développement. Il tend ainsi les bras implicitement aux deux tendances, tout en gardant les rênes du mouvement. De l'avis général, le nouveau comportement de Diamacoune a séduit le Sénégal et la Guinée Bissau. La Gambie ne saurait être mécontente. Diamacoune est devenu" Président" grâce à leur bon souhait. Au-delà on verra bien. Chacun y aura trouvé son compte. L'autorité morale et politique dont jouit Diamacoune ainsi que la disponibilité sous-régionale sans précédent à laquelle le Sénégal, la Gambie et la Guinée-Bissau se consacrent actuellement ouvrent à la diplomatie casamançaise une réelle chance de paix. Pour le moment, le recours au vocabulaire de paix - y compris pour expliquer les divergences du maquis - en dit bien plus long sur le sentiment qui prédomine au niveau populaire et médiatique que sur le plan politique qui en découlera. L'issue de cette stratégie annoncée par Diamacoune avec panache se déterminera dans les interstices de ces ambiguïtés. Le 15 septembre 2001 marquera très certainement un tournant. Il ne reste plus qu'à savoir dans quel sens. |